Souvent, dans les thrillers, les agents infiltrés sont souvent des modèles d'objectivité, de pragmatisme et d'un degré supérieur de réflexion impartiale. Néanmoins, en réalité, même les agents les mieux entraînés et les plus judicieux ne sont que des mortels. Ainsi, ils sont vulnérables aux influences qui pourraient les pousser à prendre de mauvaises décisions, ce que l'on appelle des «biais cognitifs». Le projet RECOBIA, qui a organisé sa conférence de clôture à Bruxelles la semaine dernière, a tenté d'explorer et d'évaluer ces biais cognitifs, d'étudier leur impact sur les pratiques d'analyse des renseignements et de développer des stratégies d'atténuation pour aborder leur impact.
Lors de la conférence, le coordinateur du projet RECOBIA, Frederik Schumann du CEIS a défini les biais cognitifs comme des «perturbations psychologiques produites par l'utilisation de règles qui accélèrent notre traitement cognitif de l'information». Un exemple de ce biais cognitif serait la tendance à faire confiance aux informations provenant d'un «scientifique homme, blanc et plus âgé», indépendamment du fait que son expertise soit pertinente pour résoudre le problème qui nous préoccupe. Il existe également le «biais de familiarité», la tendance à faire confiance à une personne déjà rencontrée auparavant par rapport à l'information donnée par un inconnu. Frederik explique comment, sur les trois dernières années, neuf partenaires de RECOBIA ont travaillé pour développer des stratégies qui contribueront à atténuer l'impact des biais cognitifs dans les services de renseignements pour améliorer la qualité dans ce domaine.
Une étape importante du processus de RECOBIA a été l'identification de sept tâches de renseignements clés (KIT) menées par les personnes actives dans le domaine des renseignements. Ces KIT ont été examinés en détails afin d'identifier et de documenter 28 biais cognitifs auxquels seraient soumis les agents des services de renseignements dans leur travail. L'équipe RECOBIA a ensuite appliqué ces concepts dans 40 situations spécifiques qui illustrent l'impact et les effets des biais cognitifs.
Les KIT identifiés, les biais cognitifs et les situations spécifiques formaient la base du scénario RECOBIA qui a été présenté à la conférence. En utilisant un agent fictif du nom de Peter et présentant un accident imaginaire entre la «Syldavie» et le «Borduria», le scénario démontre comment les biais cognitifs influencent le cours d'une situation fictive et comment les stratégies d'atténuation de RECOBIA, également présentées lors de la conférence, peuvent être appliquées pour renforcer la performance des analystes des services de renseignements. Comme l'explique Frederik, «reconnaître les situations dans lesquels les biais cognitifs peuvent émerger et appliquer les stratégies d'atténuation constitue un intérêt général pour tout agent des services de renseignements».
L'équipe RECOBIA a souligné le fait que tous les résultats de projet ont été développés en conjonction aux utilisateurs finaux au cours de six ateliers. Au total, plus de 100 utilisateurs finaux représentant 21 agences nationales et cinq institutions européennes se sont rendus à l'un ou plusieurs ateliers où ils ont pu interroger, contribuer et in fine valider les travaux de RECOBIA.
Le projet se conclura le 31 janvier mais l'équipe persiste qu'il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine. Ils pensent que les prochaines étapes naturelles seraient de s'appuyer sur les résultats du projet pour concevoir des outils et des sessions de formation et des solutions adaptées à chaque besoin spécifique des services de renseignements. De plus, l'équipe de RECOBIA explique qu'il reste encore beaucoup à faire dans le domaine des biais cognitifs sociaux.
source : commission européenne